Camille Esnée, son parcours

Tu as une formation de designer et tu as ensuite étudié en DMA à Sèvres, comment la céramique est arrivée sur ton chemin ?

J’ai toujours su que je voulais faire du design d’objet. Je me suis spécialisée très rapidement, dès le lycée. Je voulais surtout comprendre comment les objets étaient faits. C’est comme ça que je suis arrivée à la céramique : parce que je voulais “faire” les objets auxquels j’allais penser. Plus que concevoir, je voulais comprendre comment les fabriquer et je voyais la terre comme une matière idéale me permettant de comprendre et d'expérimenter. Je suis donc arrivée assez naturellement à Sèvres en DMA céramique. Et j’ai poursuivi avec un DSA design d’objet pour avoir un vrai bagage de designer et savoir mêler la théorie, la sociologie et la philosophie au savoir-faire que j’avais acquis.

Donc aujourd’hui tu te considères davantage comme designer, qu'artisane ?

Oui, je me considère avant tout comme designer. J'ai fait des études de céramique, mais je considère que mon champ d’expertise est avant tout mon processus de création, de conception. La céramique est un biais pour fabriquer des objets. 

Alors oui, aujourd'hui j’ai acquis un vrai savoir-faire en céramique, parce que c’est la matière qui me permet de faire le plus d’objet possible. Mais j’ai une forte attirance pour le verre, le cannage, le textile, que j’aimerais bien explorer à l’avenir !

Comment considères-tu les objets que tu crées?

Des alliés du quotidien. Je veux des objets beaux et confortables. C’est important de transmettre dans ses objets un peu de sa pensée, de son regard, de ses émotions. Il y a un aspect esthétique important, mais quand je crée un objet je me projette surtout dans son usage quotidien. J’ai envie de voir les gens vraiment apprécier chaque pièce, les choisir au quotidien. Par exemple, c’est super agréable de ressortir l’été un grand saladier que tu avais mis de côté. À un moment donné, tu choisis ce saladier pour ton plat, parce qu'il te fait penser à l’été, parce qu'il a une bonne contenance aussi. Tu vois, ces émotions, elles sont super importantes et quand je crée un nouvel objet j’ai ces projections en tête.

Tu travailles plusieurs techniques : tournage, coulage, modelage. Comment tu t’organises ?

L’étape que j’aime le plus c’est justement une fois l'objet dessiné, me demander comment je vais le fabriquer. 

Tester et réévaluer si ce que j’ai en tête va fonctionner. Certaines fois les techniques évoluent selon le rythme des commandes. On passe de pièces tournées à des pièces coulées pour être plus efficace à l’atelier. J’ai plusieurs personnes qui travaillent avec moi et qui ont des expériences différentes. Je suis la seule qui tourne, donc ça demande un peu d’organisation. Donc pour certains modèles, couler des pièces dans des moules en plâtre permet d'être plus efficace ensemble à l’atelier.

Aujourd'hui tu travailles à Rennes dans un atelier partager avec d’autres artisans, c’est important pour toi ces échanges et cette proximité ?

C’est super important :) Les regards croisés et l’analyse collective sont un vrai plus. Chaque designer et artisan autour de moi m’apporte énormément. Quand tu es dans le “faire”, tu t’habitues à certaines choses et tu les considères comme la norme. Par exemple, la rugosité des pièces. Moi j’y suis habituée mais d’autres personnes détestent cet aspect, surtout sur des objets comme une tasse ou une assiette. On à tendance à l’oublier quand on est dans la terre en permanence.  

Ça va faire 4 ans que tu as monté ton atelier, c’est quoi ton plus gros coup dur ?

Haha.. l’an dernier en Août, je me suis accordée de vrai longues vacances et j’ai dû rentrer en catastrophe. 

Mon four a lâché alors que j’étais partie. Ce genre de problème ne pouvait pas être résolu sans que je rentre. J’ai du comprendre ce qui ne marchait pas, recommander des pièces mais mon fournisseur était parti (plein mois d'août..), donc j’ai eu un gros gros stress et une angoisse totale parce que j’avais plein de commandes à terminer pour la rentrée. Émotionnellement je me suis sentie désemparée. On a surmonté ça et j’ai pu faire cuire les pièces chez d’autres céramistes.

Et la chose dont tu es la plus fière ?

Les collaborations avec certaines boutiques ou partenaires. Quand tu démarres et que tu n'es “personne” et qu’on te fait confiance, ou quand tu as de grosses commandes compliquées et que tout le monde joue le jeu, mets en avant ton savoir-faire et ton travail, c’est génial. Je suis super fière des collaborations de cette année. C’est agréable de travailler avec des gens avec qui tu es sur la même longueur d’onde, qui connaissent l’artisanat et avec qui il y a un vrai partage.

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